Journal de bord de l'Azérou - La Ferme - INÉDIT

Une maison paysanne est toujours belle.
D'abord parce qu'elle est construite à mesure d'homme, sans aucune recherche de luxe,
appropriée au plus près à ce que le climat, les façons de vivre et le ménage des champs demandent qu'elle soit.
Tout y est justement utile, nécessité par la fonction.
Ensuite pace qu'elle tient tout de sa campagne même, qu'elle refait accord avec le fond,
le granit ou le schiste qui affleure ou la glaise du talus, le fût de hêtre
ou la javelle de seigle.

L'Azerou est une des plus belles métairies de Saissac.
Epaisse maison de schiste et de granit où le mica brasille encore.
Elle a la couleur du pain qu'on y pétrit. Les murs nord et ouest sont recouverts de plaques d'ardoise cuirasse bleutée
qui les protègent des grands vents de cers.
Son tuilage à cannelures garde quelque chose de vivant d'animé qui se patine si bien.
Vieux couvert de tuiles creuses, fleuronné d'une large cheminée où s'enracinent les fleurs de la montagne.
Les fenêtres sont petites donnant l'idée d'une vie confinée, humble et bonne,
une vie qui sent le feu de branches et la soupe, mais aussi une vie rouge et gaie, comme la flamme du feu qui s'arrondit
pour envelopper la marmite noire.
En sortant devant la porte, on avait devant soi tout cet air bleuissant,
tout ce large, tout ce vent qui brille,
toutes ces landes illimitées comme la mer ou comme ces ciels tristes
qui se caillebottent aux soirs d'automne.